Avec deux médailles d’or pour la première journée des Championnats du monde, la France a connu une des plus belles journées de son histoire. Sur le parcours  des Jeux olympiques de Londres, à  Hyde Park, Pierre Le Corre en U23 (moins de 23 ans) et Dorian Coninx chez les juniors, sont devenus champions du monde. Historique.

U23 : Le Corre, chercheur d’or

Il était attendu, il a répondu présent. Pour sa dernière année dans la catégorie, Pierre Le Corre (Les Sables Vendée Triathlon) a parfaitement assumé son rôle de favori dans la catégorie U23 (moins de 23 ans). Sa huitième place à la sortie de l’eau a permis au Français, quatrième l’an dernier de ces Mondiaux U23 à Auckland, de se glisser dans le groupe de tête à vélo, constitué de 21 éléments. Une première sélection s’effectuait dès le premier tour à pied avec cinq hommes devant, dont Le Corre mais aussi l’Espagnol Fernando Alarza, le Russe Igor Polyanski, l’Australien Declan Wilson et l’Italien Matthias Steinwandter. Le Russe et l’Italien étaient les premiers à céder. Et au terme d’un incroyable sprint final, Pierre Le Corre, en 1h42’47’’, franchissait la ligne d’arrivée le premier devant Alarza et Wilson.

Neuvième à Stockholm lors de la dernière étape des World Triathlon Series (WTS), le triathlète des Sables Vendée, également étudiant en école de commerce à l’ESC Montpellier a su répondre présent dans une course où il s’affichait comme l’homme à battre. « Je n’étais vraiment pas super aujourd’hui alors gagner dans ces conditions me rend encore plus heureux, confie le champion d’Europe U23, en 2012, déjà sixième des Championnats d’Europe Elite en juin dernier. J’ai fait beaucoup le yoyo mais je me suis accroché car je savais que si j’arrivais au sprint avec ces gars-là, ça le ferait. Je me suis battu, battu, battu et j’ai lâché les chevaux à la fin. C’était mon objectif de la saison et j’avais annoncé mes ambitions. Je voulais voir comment j’allais subir la pression. J’ai eu un début de saison difficile avec quelques pépins physiques et, comme je suis en dernière année de mon école de commerce, j’avais pas mal de partiels. J’ai pu refaire un vrai cycle de foncier lors du stage à Font-Romeu avec un gros volume à pied. Je suis monté en puissance. » Une consécration qui légitime tous les espoirs suscités par ce talent brut à la vision du triathlon quelque peu atypique.  « J’ai une philosophie du sport un peu particulière. Je prends le sport comme un élément de la vie et pas comme un but. Je pratique le triathlon d’abord pour le plaisir. Ça me permet aussi d’être moins stressé. Au niveau de l’entraînement, je suis en dessous des autres en terme de volume (20-22 heures par semaine contre 30 heures pour les autres selon Pierre Houseaux). Je vais m’y mettre la saison prochaine. J’ai envie de m’amuser plus régulièrement avec les meilleurs du monde. Et j’ai vraiment envie de rapporter des médailles à la France Ce titre est une étape importante. C’est un petit pas dans la cour des grands. Tous les meilleurs actuels ont eu cette médaille d’or en U23. Même s’il me reste encore beaucoup de travail, c’était une étape importante et elle est validée. »  

Dans la course féminine, Emmie Charayron (EC Sartrouville) était la seule Tricolore au départ. Auteur d’une bonne natation (5e), la Française s’est ensuite mis bien au chaud dans le gros peloton parti à la chasse de la Britannique Lucy Hall (licenciée à Brive Limousin Triathlon), seule en tête pendant l’essentiel de la partie cycliste mais rattrapée dans le dernier tour. Dans un groupe de 9 à l’issue du premier tour à pied, Emmie cédait malheureusement du terrain au fil des kilomètres. Elle termine neuvième à 1’01’’ tandis que l’Australienne Charlotte McShane s’impose au sprint devant les Canadiennes Ellen Pennock et Amelie Kretz.

Pierre Houseaux (entraîneur équipe de France) : « Il nous a fait peur, mais il l’a fait. Pierre n’était pourtant pas dans un grand jour. Il n’avait pas de jus en natation et en vélo. Il ne se sentait pas très bien mais a su le cacher. Les autres auraient sans doute pu le faire sauter mais ils n’ont pas insisté et cela a permis à Pierre de redescendre un peu en pulsation. A pied, il est parti un peu au bluff et comme il est bon au sprint, ça a marché. Il a montré qu’il pouvait gagner même dans un mauvais jour. C’est très fort. Il a été super intelligent, sans jamais s’affoler. C’est peut-être encore plus intéressant de pouvoir gagner dans ces conditions que s’il avait gagné avec panache. C’est la preuve que c’est un grand. »

Juniors : Dorian Coninx de bout en bout

Déjà sacré champion d’Europe en juin à Alanya, Dorian Coninx (Valence Triathlon), 19 ans, a confirmé son énorme potentiel en remportant à Londres le titre mondial.  Sorti le premier de l’eau, puis constamment aux avant-postes sur le vélo, le Valentinois a ensuite réalisé une course à pied parfaite, ne laissant à personne le soin de mener la course. Accompagné de deux Britanniques dans les derniers hectomètres, Dorian Coninx a placé une ultime accélération pour aller se parer d’or comme le firent ces dernières années avant lui Frédéric Belaubre (2000), Aurélien Raphaël (2007, devant Alistair Brownlee et Vincent Luis), Vincent Luis (2008) et chez les filles, Marion Lorblanchet (2002), Juliette Benedicto (2004) et Emmie Charayron (2009). En 51’17’’, il devance de 3 secondes  les Britanniques Marc Austin et Grant Sheldon.

« C’est fou !, lâche le nouveau champion du monde, étudiant en Staps à Grenoble. C’est un rêve qui se réalise. J’ai encore du mal à réaliser. Quand on est sportif, un titre de champion du monde, c’est le summum. C’est dans mes habitudes de mener tout le temps car je n’aime pas trop subir la course. Aujourd’hui, j’ai nagé fort pour essayer de faire le trou mais ça n’a pas marché. J’ai ensuite roulé fort pour faire la différence mais ça n’a pas marché non plus. Alors il ne restait plus qu’à courir vite. Dans le dernier tour, je ne pensais plus qu’à franchir la ligne le premier. Ce titre est le fruit d’un gros travail avec mon groupe d’entraînement à Grenoble sous la houlette de Raphaël Mailharrou. J’ai réussi à être présent sur les deux grosses courses de l’année. Ma 6e place lors du Grand Prix F.F.TRI. de Sartrouville m’avait mis en confiance. Ça donne envie quand on est dans la même course que les Brownlee ou les autres grands de la discipline. Mais il va falloir bosser dur pour passer sur la course supérieure puisque je serai l’an prochain U23.»

Vice-champion d’Europe, Raphaël Montoya (EC Sartrouville) a lui aussi réussi une belle course. Dans le groupe de tête à pied après avoir profité du retour du groupe de chasse à vélo juste avant la seconde transition, Raphaël n’a cédé que dans les derniers kilomètres. Il prend une très belle quatrième place à 22 secondes de son coéquipier.

Un peu moins de réussite dans la course fille. Dans le groupe de tête à vélo constitué de 14 jeunes femmes, Cassandre Beaugrand (Saint-Raphaël Triathlon) fut à mi-parcours pédestre en cinquième position à 10 secondes seulement du podium avant de légèrement rétrograder pour terminer finalement 6e à 1’14’’ de l’Américaine Tamara Gordan (argent pour la Britannique Taylor-Brown et bronze pour l’Allemande Lindemann). Dans le groupe de chasse à vélo, Léonie Periault (Issy Triathlon), vice-championne du monde l’an dernier, manqua le bon paquet. A 1’25’’ à la seconde transition, elle réalise néanmoins une belle course à pied (6e temps) pour remonter au 12e rang, à 1’58’’.

Sébastien Poulet (entraîneur des juniors) : « Le bilan est forcément positif avec le titre de Dorian. Avec Raphaël, nous savions que nous avions deux athlètes capables de jouer le podium au même titre que 8 ou 10 autres. Ils ont répondu présents. Dorian sort de l’eau en tête et a ensuite été constamment aux avant-postes. Il a été champion d’Europe, champion du monde, cela prouve qu’il sait être là le jour J. Au-delà du titre, cela laisse espérer de belles choses pour passer le cap vers les Elites. Pour Raphaël ça a été un peu plus compliqué dans l’eau mais les circonstances de course lui ont été favorables avec un regroupement. Il a montré qu’il fait aussi partie des meilleurs. Du côté des filles, je dresse aussi un bilan positif car on espérait des places de finaliste. Cassandre est encore cadette première année et effectue sa première année internationale. Faire 10 des Europe et 6 des Monde, c’est très bien. Elle a montré beaucoup de progrès grâce à beaucoup de travail. Pour Léonie, sa fragilité dans l’eau a été rédhibitoire malgré une belle course à pied. »

Suite des compétitions ce vendredi avec les Championnats du monde de paratriathlon où la France peut aussi espérer ramener plusieurs médailles.

 

(c) Janos Schmidt/ITU