Article paru dans le magazine 197 _ juillet 2020 / Rédigé par Jean-Baptiste WIROTH – PhD, Docteur en Sciences du Sport et Fondateur du réseau de coach WTS (www.wts.fr)

Lors d’un effort en triathlon, l’organisme est soumis à une contrainte importante, tant au niveau métabolique que musculaire. En compétition, la contrainte est encore plus importante. Pour préparer l’organisme à ce type d’effort, il est important d’adopter une alimentation adaptée tant avant, que pendant, ou qu’après. Voyons dans cet article quelles sont les recommandations en terme de nutrition “avant effort”.

Le métabolisme à l’effort

Pour produire un travail musculaire d’endurance, le muscle dispose de 2 substrats énergétiques principaux : les graisses et les sucres. Ces substrats sont mis en réserve afin de subvenir aux besoins du muscle lorsqu’il est activé. A l’effort, ils sont métabolisés au niveau des mitochondries (les minuscules centrales énergétiques musculaires), où ils sont transformés en ATP (adénosine triphosphate) pour être directement exploitables par les fibres musculaires.

À l’effort, le muscle utilise toujours un mélange énergétique d’acides gras et de glucose; la proportion variant en fonction de la vitesse de déplacement et du niveau d’entraînement. De manière schématique, les acides gras permettent d’aller loin et le glucose d’aller vite.  En parallèle, certains organes, en particulier le cerveau, requièrent un approvisionnement constant en glucose. Pour éviter les “coups de mou”, il est donc impératif d’absorber des glucides avec régularité dès que l’effort est supérieur à 1h.

Quel carburant pour quelle épreuve ?

En triathlon sprint (format XS) et courte distance (format S), la vitesse est maximale et l’effort bref (1h-1h30). Le muscle a donc besoin de “supercarburant” pour produire une puissance élevée. Pour ce faire, il repose principalement sur ses réserves intrinsèques de glucides (glycogène). En triathlon longue distance (M, L, XL), l’effort est plus long et la vitesse inversement proportionnelle à la distance. Le muscle va donc reposer sur un mélange énergétique plus riche en graisses pour produire un effort de moyenne intensité.

Quels aliments privilégier avant l’effort ?

Pour répondre efficacement aux besoins de l’organisme lors d’un triathlon, les derniers jours, ainsi que le dernier repas, sont cruciaux.

Les objectifs principaux de la ration précédant une compétition ou un entraînement sont les suivants (par ordre d’importance) :

  • Aborder l’épreuve avec des réserves énergétiques maximales
  • Effacer la fatigue liée à la préparation
  • Prévenir les troubles digestifs qui peuvent survenir pendant l’effort
  • Eviter de prendre du poids inutile pendant la phase d’affûtage 

Les 3 derniers jours avant une compétition

Dans les années 1970-1980, le Régime Dissocié Scandinave (RDS) avait la réputation d’être l’arme absolue pour constituer des stocks énergétiques maximaux avant une compétition importante. Cette énergie, principalement glucidique, est stockée dans les muscles et le foie sous forme de glycogène.

Ce régime consistait à : 

  • Effectuer un effort épuisant les stocks de glycogène à J-7
  • Adopter une alimentation très pauvre en glucides, mais riche en lipides et en protéines de J-7 à J-4, puis consommer des repas hyperglucidiques (10 g de glucides par kg de poids corporel et par jour) de J-3 au jour J

Aujourd’hui, de récentes études semblent démontrer que chez un sportif entraîné, l’adoption d’un tel régime est inutile pour constituer un stock optimal de glycogène.

En pratique, on peut donc dorénavant conseiller de :

  • Conserver ses habitudes alimentaires
  • Dès J-4, opter pour une ration enrichie en glucides (65 % glucides, 20 % lipides, 15 % protides) à l’issue du dernier entraînement digne de ce nom et ce jusqu’au jour J : augmenter de 20% la part de féculents à chaque repas (pomme de terre, pâtes, riz, semoule…etc).
  • Veiller à assurer une hydratation optimale pendant ces 3 jours : 1 à 2 litres d’eau par jour
  • Limiter les aliments acidifiants (viande rouge, fromages, charcuterie, alcool, sodas), ainsi qu’un apport excessif de fibres (fruits et légumes, légumes secs)
  • Orienter l’entraînement de J-3, J-2 et J-1 sur du repos ou de la récupération active

Zoom sur le petit-déjeuner

Le petit déjeuner est un repas important pour les sportifs car il permet de stopper le catabolisme propre à la situation de jeûne nocturne, de reconstituer les réserves entamées durant le sommeil, et d’aborder la journée dans de bonnes conditions. L’absence de petit-déjeuner rallonge la période de jeûne et conduit donc à une accentuation de la phase catabolique. Ce dernier élément permet d’ailleurs de mieux comprendre l’intérêt des entraînements à jeun : ceux-ci permettent de placer l’organisme dans des conditions métaboliques proches de celles rencontrées à la fin d’une longue séance d’entraînement ou à la fin d’une compétition (glycémie abaissée, réserves hépatiques de glycogène fortement entamées, cortisolémie élevée…).

Si un entraînement est prévu durant la journée, notamment en fin de matinée ou dans l’après-midi, le petit-déjeuner a une importance cruciale car il permet la constitution de réserves fort utiles dans la perspective de l’effort à accomplir.

Hormis pour les épreuves de très longue durée et de basse intensité, le dernier repas avant compétition sera avant tout léger. Il devra être riche en glucides, apporter quelques protéines, et assurer un état d’hydratation optimal. Il est recommandé d’avoir terminé de manger de 2 à 3 heures avant le début de l’épreuve.

Que manger au petit-déjeuner ?

Le petit-déjeuner est un véritable repas qui contribue pleinement aux besoins de l’organisme en énergie et en “matériaux de construction”. Il doit donc apporter en priorité les nutriments suivants :

  • eau : en l’absence d’hydratation durant la nuit, l’organisme est systématiquement déshydraté au petit-matin (surtout si vous respirez un air très sec comme en altitude). Le petit-déjeuner doit donc réhydrater l’organisme, que ce soit sous forme de boisson (eau, thé, café, lait, lait de soja, jus de fruit) ou d’aliment riche en eau (fruits frais, laitages). De plus, boire un grand verre d’eau dès le réveil est une bonne habitude à intégrer.
  • glucides : le petit-déjeuner est particulièrement important pour la constitution des réserves de glycogène à la fois en terme de préparation à l’effort et en terme de récupération (des efforts de la veille). A ce titre, il doit impérativement comprendre diverses sources de glucides : des simples (fruit, miel, confiture) et des complexes (fruit, céréales…)
  • protéines : les protéines sont particulièrement importantes pour la construction musculaire. De plus, les protéines animales favorisent la sécrétion d’insuline et de dopamine. L’insuline est une hormone indispensable pour le stockage cellulaire. La dopamine est un neurotransmetteur qui joue un véritable rôle de starter de l’action au niveau cérébral. 

Dans le prochain numéro de Trimax Magazine, nous aborderons le sujet de la nutrition pendant l’effort.

Références : Tsintzas et al. Human muscle glycogen metabolism during exercise. Sports Med. 1998 Jan; 25 (1): 7-23.